Lignes directrices de l’article 17 : ménager chèvre (droit d’auteur) et chou (liberté d’expression)

Par Véronique Dahan, avocate associée, Joffe & Associés, dans le magazine Edition Multimédi@

 

 

Le 4 juin dernier, la Commission européenne a publié des lignes directrices (1) sur l’application de l’article 17 controversé de la directive « Droit d’auteur et droits voisins dans le marché numérique » (2). Pour l’exécutif européen « l’objectif des lignes directrices [sur l’article 17 de cette directive censée avoir été transposée depuis le 7 juin 2021 au plus tard] est de parvenir à une transposition correcte et cohérente de cet article dans les Etats membres, en portant attention à la nécessité d’équilibrer les droits fondamentaux et le recours aux exceptions et limitations [au droit d’auteur] » (3).

 

Œuvres protégées et liberté de création

Ces « orientations » sur l’article 17 étaient très attendues, même si de nombreux Etats membres ont d’ores et déjà transposé la directive « Copyright » en question dans leur droit national, ou sont en phase finale de transposition. La rédaction de ces lignes directrices a provoqué des craintes de la part des titulaires de droits qui redoutaient que la Commission européenne recommande aux Etats membres de restreindre l’application et les effets de l’article 17.
Rappelons que l’intention du législateur est d’assurer un  niveau élevé de protection aux titulaires de droits d’auteur en Europe. Aussi, toute recommandation qui viserait à restreindre la portée de la directive « Droit d’auteur et droits voisins dans le marché numérique » serait contraire à l’intention du législateur. Et ce, d’autant qu’une protection élevée des droits d’auteur est essentielle non seulement pour la création mais aussi pour son financement – tout en maintenant l’équilibre entre les intérêts des auteurs (propriété intellectuelle sur leurs œuvres) et ceux des utilisateurs (liberté
d’expression et de création).
Seule une transposition uniforme dans tous les pays européens permettra une application efficace de cette directive « Copyright ». Son article 17 propose un nouveau régime juridique de responsabilité pour les plateformes de partage de contenus en ligne, lesquelles mettent à disposition, à des fins lucratives, une quantité importante de contenus protégés que leurs utilisateurs ont souvent directement mis en ligne. Ce texte législatif, qui a suscité de nombreux débats, répond à l’un des objectifs que s’était fixée la Commission européenne, à savoir : améliorer le fonctionnement du marché de la diffusion en ligne des biens culturels protégés, en mettant en place un système d’autorisation et de responsabilité des plateformes de services de partage de contenus en ligne. L’article 17 de la directive, intitulé justement « Utilisation de contenus protégés par des fournisseurs de services de partage de contenus en ligne », pose un régime de responsabilité hybride qui conduit les plateformes à répondre à deux types d’obligations : fournir leurs meilleurs efforts pour obtenir les autorisations nécessaires auprès des titulaires de droits et assurer une rémunération appropriée au profit de ces derniers ; fournir également leurs meilleurs efforts afin de garantir l’indisponibilité des contenus nonautorisés par les titulaires de droits.
Ainsi, cet article 17 est inédit en ce qu’il impose désormais aux services de partage de contenus en ligne d’obtenir les autorisations des ayants droit pour diffuser leurs œuvres, et de les rémunérer en conséquence. Sans accord préalable, ces plateformes numériques devront faire état de l’indisponibilité des œuvres non-autorisées. Les lignes directrices de la Commission européenne font suite aux dialogues mis en place entre les fournisseurs de services de partages de contenus en ligne et les titulaires de droits, afin d’examiner les meilleures pratiques pour une coopération. L’objectif principal étant d’apporter une aide aux Etats membres dans le cadre de la transposition de cette directive. Ces « orientations » – terme employé dans la traduction en français de ce guidance, plutôt que « lignes directrice » qui n’apparaît pas dans le texte – apportent, tout d’abord, des précisions quant au champ d’application de l’article 17.

 

Le streaming illicite dans le collimateur

 

Le « fournisseur de services de partage de contenus en ligne » concerné par la directive « Copyright » est défini par celle-ci (4) comme étant « le fournisseur d’un service de la société de l’information dont l’objectif principal […] est de stocker et de donner au public l’accès à une quantité importante d’œuvres protégées par le droit d’auteur ou d’autres objets protégés qui ont été téléversés par ses utilisateurs qu’il organise et promeut à des fins lucratives ».
Cette directive de 2019 vise notamment ceux qui « jouent un rôle important sur le marché des contenus en ligne en étant en concurrence pour les mêmes publics avec d’autres services de contenus en ligne, comme les services de diffusion audio et vidéo en flux continu ». Autant dire que les GAFAM et toutes plateformes de streaming vidéo, de musique en ligne ou de réseau social sont visés. La Commission européenne recommande aux Etats membres, par souci de sécurité juridique, de transposer explicitement, sans modification, cette définition dans leur législation nationale et précise, par ailleurs, que ce champ ne peut être augmenté ou réduit.

Pas de surveillance généralisée du Net

 

Une analyse au cas par cas devra être menée afin de déterminer si le fournisseur tombe dans le champ de l’article ou non. En outre, ces lignes directrices apportent des précisions au regard de l’« autorisation des titulaires de droits » (5). Le terme « autorisation » n’est pas défini par la directive « Copyright ». Dès lors, il est conseillé aux Etats membres de mettre en place des moyens visant à encourager le développement de licences (modèles d’autorisation, mécanisme volontaire de facilitation d’accord, licences collectives, …). Par ailleurs, il est spécifié que les autorisations octroyées aux fournisseurs couvrent également les usages non-commerciaux ou ne générant pas de revenus significatifs réalisés par les utilisateurs.
Ainsi, les plateformes numériques de partage de contenus en ligne deviennent directement responsables de la mise à disposition d’un contenu non autorisé par son auteur, sans que le régime de responsabilité limitée de l’hébergeur ne puisse s’appliquer. Toutefois, le service en ligne sera exonéré de toute responsabilité s’il démontre avoir satisfait aux trois conditions cumulatives suivantes : fournir ses meilleurs efforts pour obtenir une autorisation ; (1)fournir ses meilleurs efforts pour assurer l’indisponibilité des œuvres protégées pour lesquelles les titulaires de droit ont fourni les informations nécessaires ; (2) faire preuve de réactivité dès la réception d’une notification motivée pour bloquer l’accès aux contenus protégés (3-a) et mettre en œuvre ses meilleurs efforts pour éviter dans le futur un scénario similaire (3-b).
Ces conditions sont appréciées selon un principe de proportionnalité (6), détaillé par l’article 17 justement (7), et qui est rappelé à de nombreuses reprises par Bruxelles.

La première condition – meilleurs efforts d’obtention d’une autorisation – se doit d’être évaluée au cas par cas au regard des spécificités du marché. Sans définition, là aussi, de la notion de « meilleurs efforts », la Commission européenne ajoute que cela s’entend par des démarches proactives et de bonne foi de la part des plateformes numériques concernées pour engager et poursuivre les négociations avec les titulaires de droit.

L’objectif de la deuxième condition – fournir ses meilleurs efforts pour assurer l’indisponibilité des œuvres protégées pour lesquelles les titulaires de droit ont fourni les informations nécessaires – n’est pas de recommander l’usage de technologies spécifiques pour parvenir à rendre indisponibles les œuvres protégées. L’idée est de favoriser la coopération entre les fournisseurs en ligne et les titulaires de droits en leur laissant une certaine flexibilité, et que les acteurs du Net en question procèdent à un examen humain rapide pour décider si le contenu doit rester en ligne ou être supprimé.
La Commission européenne tient à rappeler que l’objectif de la troisième et dernière condition – faire preuve de réactivité dès la réception d’une notification motivée pour bloquer l’accès aux contenus protégés et mettre en œuvre ses meilleurs efforts pour éviter dans le futur un scénario similaire – n’est pas de créer une obligation générale de surveillance pour les plateformes numériques.
Ce régime de responsabilité se veut pragmatique et prévoit un système particulier pour les fournisseurs qui proposent du contenu en ligne depuis moins de trois ans et qui ont un chiffre d’affaires annuel de moins de 10 millions d’euros. Il s’agit de critères que les Etats membres ne peuvent pas modifier. Parmi ces fournisseurs, les conditions qu’ils doivent respecter vont dépendre de leur audience : ceux réunissant moins de 5 millions de visiteurs devront respecter les conditions (1) (2) et (3-a) susvisées, tandis que ceux qui réunissent plus de 5 millions de visiteurs devront respecter les conditions (1), (2), (3-a) et (3-b).
Enfin, la Commission européenne rappelle que le régime instauré par l’article 17 se veut souple. Une souplesse marquée par l’essence même du texte qui tend à protéger les usages légitimes ne portant pas atteinte aux droits d’auteur. L’article 17 n’affecte en rien la possibilité pour les utilisateurs et les plateformes de se prévaloir des exceptions existantes relatives notamment au droit de critique et de citation, à la caricature, à la parodie et au pastiche. Des notions non-définies qui doivent, selon la Commission européenne, être analysées dans leur sens commun et au regard du contexte dans lequel elles interviennent. Ainsi, elle ajoute que les Etats membres devraient adapter ces exceptions ou limitations obligatoires de manière à ce qu’elles s’appliquent de façon cohérente avec la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (8), « notamment la liberté d’expression et la liberté des arts ».

Expression des internautes et titulaires de droits

 

Toujours dans une logique de souplesse, ce régime de responsabilité des plateformes numériques impose la mise en place d’un mécanisme de traitement des plaintes des utilisateurs. La Commission européenne préconise un mécanisme simple et sans frais pour garantir son efficacité.
En ce sens, il est proposé que les plateformes pourraient fournir des formulaires en ligne aux utilisateurs. Ce mécanisme pourrait également aller plus loin en permettant directement aux titulaires de droits et utilisateurs d’échanger.
En définitive, l’article 17 et les récentes lignes directrices de la Commission européenne tentent de trouver un équilibre entre protection des titulaires de droits et la liberté d’expression.

Notes

(1) – « Guidance on Article 17 of Directive 2019/790 on Copyright in the Digital Single Market » : https://lc.cx/Guidance-EC-Article17
(2) – Directive dite « Copyright » 2019/790/CE du 17-04-19 : https://lc.cx/Copyright17-05-19
(3) – Voir la version en français de ces « orientations » : https://lc.cx/Orientations17-FR
(4) – Article 2(6).
(5) – Article 17(1).
(6) – Prise en compte notamment du type de l’audience et de la taille du service, ainsi que de la disponibilité de moyens et leur coût pour le fournisseur de services.
(7) – Article 17(5).
(8) – https://lc.cx/Charte-DF-UE

 

Jeux Olympiques et fiscalité : Aperçu des règles afin que l’ivresse de la victoire ne laisse pas un goût fiscal amer

Par Virginie DAVION et Clément PEILLET – Téléchargez notre Newsletter ici : Newsletter tax – 28 juin 2021

 

  • S’agissant des organisateurs

Cette année, aucune retombée fiscale directe n’est attendue en France dans la mesure où la compétition est organisée sur le territoire japonais.

Par ailleurs, pour les Jeux Olympiques de Paris 2024, par décret n°2020-796 du 27 juin 2020, le gouvernement a d’ores et déjà octroyé au CIO et à ses filiales le régime fiscal dérogatoire applicable aux organismes chargés de l’organisation en France d’une compétition sportive internationale (article 1655 septies du code général des impôts) à savoir notamment une exonération d’impôt sur les bénéfices et de taxes sur les salaires.

Pour autant, le surplus de consommation liée à l’hospitalité lors d’une telle compétition permettra d’entrainer des recettes de TVA supplémentaires dans les caisses du Trésor.

 

  • S’agissant des athlètes

Lors d’une compétition internationale, les athlètes sont susceptibles de percevoir des primes de résultat.

La tentation est grande de penser que cette somme concernant une compétition menée à l’étranger est exonérée de taxation en France.

En réalité, comme toujours, une analyse spécifique est nécessaire en fonction de la situation de chaque sportif, notamment eu égard aux conventions fiscales applicables.

S’agissant de nos sportifs engagés aux Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo, les primes ont été revalorisées respectivement à 65.000 euros pour l’or (au lieu de 50.000), 25.000 pour l’argent (au lieu de 20.000) et enfin 15.000 pour le bronze (au lieu de 13.000). En réalité cette revalorisation du montant des primes s’explique par le fait qu’aucune exonération d’impôt sur le revenu n’est accordée aux athlètes comme cela avait été le cas pour les médaillés de Rio (article 4 de la loi de Finances pour 2017).

Ainsi, nos athlètes, qui pour la plupart, ne pratiquent pas des spécialités sportives rémunératrices professionnellement, et comptent souvent sur ces primes pour pouvoir améliorer leurs conditions d’entrainement, seront contraints de se limiter au régime prévu par l’article 163-0 A ter du code général des impôts qui prévoit la possibilité pour les médaillés de bénéficier à leur demande de la répartition à part égale sur 4 ans du montant de ces primes pour l’établissement de l’impôt sur le revenu.

  • A noter par ailleurs que le dispositif est cumulable avec le dispositif de lissage prévu à l’article 84 du code général des impôts dans l’hypothèse où l’ensemble des conditions d’application de ce dernier sont par ailleurs remplies.

 

  • S’agissant des paris sportifs des particuliers

L’organisation des compétitions sportives s’accompagne souvent d’une augmentation des paris sportifs comme en a récemment fait écho la presse lors de l’Euro de Football en cours.  Que le gain soit minime ou important, le gagnant n’est en principe pas imposé dans la catégorie des bénéfices non-commerciaux dite « BNC » pour ses gains perçus auprès d’entités agréées par l’ARJEL (sauf hypothèse de fraude).

L’analyse effectuée pour les joueurs de poker, à savoir que sont imposables au titre des BNC les gains réalisés par les joueurs professionnels dans des conditions permettant de supprimer ou d’atténuer fortement l’aléa normalement inhérent aux jeux de hasard n’est en effet pas transposable aux paris sportifs (cf. TA Marseille, 20 juillet 2020, n°1803646). Faute de pouvoir bénéficier des pouvoirs d’oracle du regretté Paul le Pouple et bien que nous soyons tous de fins connaisseurs du sport, nos perspectives de gains resteront en effet cette année encore, à notre grand regret, soumis à un fort aléa, et donc non imposables fiscalement.

Nous nous tenons à votre disposition pour toutes vos questions fiscales en relation avec l’ensemble des équipes du Cabinet.

1er PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFIVATIVES POUR 2021

LIRE LA NEWSLETTER par Virginie DAVION et Clément PEILLET

LES POSSIBILITES DE REPORT EN ARRIERE DES DEFICITS SERAIENT ELARGIES (dans le temps et en montant)

 

Le projet de loi de finances rectificative pour 2021 déposé le 2 juin dernier à l’Assemblée nationale prévoit un aménagement temporaire très favorable pour les entreprises du dispositif de report en arrière des déficits (dit « carry back »).

 

ACTUELLEMENT, l’article 220 quinquies du code général des impôts permet aux entreprises d’opter pour le report en arrière du déficit constaté à la clôture d’un exercice :

  • Dans la limite d’un plafond de 1M€,
  • Uniquement sur le bénéfice de l’exercice précédent dans la limite de la fraction non distribuée de ce bénéfice.

L’entreprise dispose alors d’une créance sur le Trésor correspondant au produit du déficit imputé (au maximum 1 M€) par le taux de l’IS applicable à l’exercice de réalisation du bénéfice. Cette créance peut ensuite (i) être utilisée pour payer des cotisations ultérieures d’impôt sur les sociétés ou être remboursée à l’issue d’une période de 5 ans mais aussi (ii) être mobilisée auprès d’un établissement de crédit au cours de la période qui précède son remboursement.

 

Le PLFR 2021 propose d’introduire les modifications temporaires suivantes à ce régime pour tout déficit constaté par une entreprise (ou un groupe d’intégration fiscale) au titre du premier exercice déficitaire clos à compter du 30 juin 2020 et jusqu’au 30 juin 2021 :

  1. Le déficit constaté au titre de cet exercice pourrait, sur option, être imputé sur le bénéfice déclaré au titre des trois derniers exercices (et non plus seulement au titre du dernier exercice précédent celui de constatation du déficit). >> Pour une société clôturant au 31 décembre 2020 seront concernés les exercices clos en 2017, 2018 et 2019.
  2. Le montant du déficit imputable ne serait pas plafonné.
  3. Pour le calcul de la créance d’impôt issue du report en arrière, le taux d’impôt sur les sociétés à appliquer aux déficits reportés en arrière serait de 25% (ou 15 % pour les entreprises bénéficiant du taux réduit des PME) et non le taux de l’IS applicable à l’exercice de réalisation du bénéfice.
  4. Un délai allongé pour exercer l’option serait institué : l’option pourrait être exercée jusqu’au 30 septembre 2021 et au plus tard avant que la liquidation de l’impôt sur les sociétés dû au titre de l’exercice suivant celui au titre duquel l’option est exercée ne soit intervenue.

Malheureusement, à ce stade, il n’est pas prévu de règles dérogatoires permettant un remboursement immédiat des créances d’impôts provenant de l’application de cet assouplissement.

 

Nous nous tenons à votre disposition pour toute question que vous pourriez avoir s’agissant de ce projet de loi.

Vers une réglementation européenne des usages de l’Intelligence Artificielle

Téléchargez ici notre Newsletter

Par Véronique DAHAN

 

Le 21 avril dernier, la Commission européenne a publié un premier projet de règlement visant à fournir un ensemble de règles harmonisées en matière d’intelligence artificielle (« IA ») au niveau de l’Union, ainsi qu’un plan d’action coordonné avec les Etats membres en la matière.

 

Depuis plusieurs années, l’Union européenne s’est fixée comme objectif de réguler le numérique à l’échelle des 28 (aujourd’hui 27). Une première étape a déjà été franchie avec le règlement UE 2016/679 dit « Règlement RGPD ». Elle se tourne désormais vers l’IA. Qu’est-ce que l’IA ? L’IA peut désigner l’ensemble des techniques, des procédés utilisés pour tenter de reproduire l’intelligence humaine. Des techniques de prédiction et d’optimisation qui peuvent améliorer la compétitivité des entreprises mais également de l’économie européenne. Toutefois, cela n’est pas sans inconvénients, une telle technologie peut également apporter des risques pour les individus et pour la société. L’Union Européenne en a conscience. Après diverses publications et lignes directrices en 2018 et 2019, un livre blanc de la Commission sur l’IA a été publié en 2020 afin de définir son écosystème au niveau européen. Un an après ce livre blanc, qui a permis de fixer les lignes directrices, la Commission européenne publie de nouvelles règles et un plan d’action visant à promouvoir la confiance dans l’IA. Une confiance qui, pour reprendre les mots de Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive pour une Europe adaptée à l’ère du numérique, « n’est pas un luxe mais une nécessité absolue ».

 

Cet ensemble de règles tend à s’assurer, d’une part, que les systèmes d’IA utilisés sur le marché européen soient sûrs et respectent les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union européenne. D’autre part, il souhaite assurer une sécurité juridique pour faciliter les investissements et innovations en matière d’IA.

Pour y parvenir, la Commission a, tout d’abord, opté pour un champ d’application extensible. En effet, la Commission aurait la possibilité d’amender, par voie d’actes délégués, l’annexe 1 du règlement afin de se tenir à jour des éventuelles évolutions technologiques en matière d’IA. Ensuite, il a été retenu une approche fondée sur les risques. Cette approche entend classifier les utilisations de systèmes d’IA de la manière suivante : risque inacceptable, risque élevé et risque faible ou minime. Les systèmes d’IA catégorisés comme créant un risque inacceptable seront prohibés, il s’agit notamment des systèmes violant les droits fondamentaux et/ou les valeurs de l’Union. Les systèmes d’IA qualifiés à haut risque sont ceux qui sont susceptibles de causer un risque pour la santé ou la sécurité des individus. Ces systèmes devront se mettre en conformité avec des exigences obligatoires. Pour ce qui est de la dernière catégorie, ceux-ci seront libre d’utilisation ou soumis à certaines exigences de transparence pour ceux qui représentent un risque minime. Enfin, ce projet ouvre la possibilité de mettre en place des codes de conduite. Des codes qui auront pour objet d’encourager les systèmes d’IA ne représentant pas un risque élevé à appliquer volontairement les exigences obligatoires s’imposant aux systèmes à risque élevé.

 

Ce projet s’inscrit dans un objectif plus global, faire de l’Union européenne un pôle de référence en matière d’intelligence artificielle. Désormais publié, ce projet doit maintenant être adopté par le Parlement européen et les Etats membres dans le cadre de la procédure législative ordinaire. Ce n’est qu’après cette étape que le règlement deviendra applicable dans l’ensemble des pays de  l’Union européenne.

Commande publique et sanction des pratiques anticoncurrentielles

L’analyse de la jurisprudence révèle une certaine verticalité du droit de la concurrence appliquée aux contrats de la commande publique. En effet, la compétence juridictionnelle administrative est comprise de façon extensive, et le régime de prescription semble favorable à la victime. En outre, le principe de solidarité des mis en cause est inscrit dans la loi. Enfin la méthode d’évaluation du préjudice emprunte des raccourcis parfois contestables.

 

Lire l’article de Mathieu Gaudemet

Journée mondiale de la propriété intellectuelle

La journée mondiale de la propriété intellectuelle, créée par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) en 2000, vise à sensibiliser le grand public sur l’impact des marques, des brevets, du droit d’auteur… sur la vie quotidienne et à encourager la créativité et l’innovation au sein des entreprises. La date du 26 avril a été choisie pour cette journée de célébration car elle coïncide avec la date à laquelle la Convention instituant l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle est rentrée en vigueur en 1970.

 

Levier de croissance et facteur de compétitivité, la propriété intellectuelle joue un rôle essentiel et doit être gérée de manière stratégique en fonction de la taille des entreprises, du secteur d’activité et du dynamisme de chaque marché.

 

Cette journée est l’occasion pour l’équipe Propriété Intellectuelle de J&A de rappeler quelques conseils pratiques en matière de valorisation des droits de propriété intellectuelle.

 

  • Mettre en place une stratégie de protection

 

Une protection efficace passe – lorsque les conditions sont réunies – par le dépôt de marques, de dessins et modèles et de brevets dans les pays pertinents pour acquérir un monopole d’exploitation, assurer une date certaine à sa création ou son invention, et détenir ainsi des droits de propriété industrielle pour agir en cas de contrefaçon et maintenir son monopole.

 

Beaucoup d’entreprises considèrent encore la protection de leur propriété intellectuelle comme un coût et non comme un atout stratégique. Or, mettre en place une stratégie réfléchie de protection de ses créations et innovations a de nombreux avantages qui permettra un retour rapide de l’investissement :  rassurer les investisseurs (les opportunités de levées de fonds sont plus élevées) et ses clients, valoriser son image, gagner en valeur ajoutée et en attractivité, faciliter l’expansion internationale notamment par le biais de partenariats et licences croisées…

 

Lorsque le dépôt n’est pas envisageable, comme pour les œuvres de l’esprit (en ce compris en France certains éléments de logiciels), qui sont protégées du seul fait de leur création et sous réserve d’être originales, un dépôt sous enveloppe Soleau auprès de l’INPI, un dépôt chez un huissier de justice ou l’insertion de l’œuvre en cause au sein d’une blockchain sont des alternatives efficaces pour se préconstituer la preuve de la date de sa création et bénéficier ainsi d’une antériorité.

 

Lorsqu’un dépôt n’est pas souhaitable, surtout en matière de brevet puisque cela suppose la publication d’une description très précise de l’invention accessible à tous dont ses concurrents, la mise en place d’une politique de protection du secret des affaires sera plus adéquate. Une telle protection est d’autant plus efficace que la directive 2016/943 du Parlement européen et du conseil du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées (secret d’affaires) a été transposée en France par la loi du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires, apportant des précisions concrètes sur cette notion. Concrètement, il est important dans un premier temps d’identifier les informations et les ressources au sein de sa société, de procéder à une classification des données confidentielles et d’identifier précisément les personnes y ayant accès. Dans un second temps, il convient de mettre en place des outils pour protéger et sécuriser le secret des affaires (formaliser et dater les informations confidentielles, mesures spécifiques concernant les salariés et partenaires par la mise en place systématique d’accords/clauses de confidentialité, sensibilisation des salariés etc.).

 

  • Adopter une stratégie contentieuse pour défendre ses droits de propriété intellectuelle

 

La valorisation de la propriété intellectuelle nécessite également d’adopter une véritable stratégie contentieuse. Plusieurs actions peuvent être initiées en fonction de la taille de l’entreprise et du marché pertinent, telles que :

 

  • la mise en place de surveillances des dépôts réalisés par les tiers, permettant au titulaire d’un droit de propriété industrielle d’identifier un dépôt problématique et d’agir rapidement par le biais de procédures administratives rapides et peu coûteuses ;

 

  • la mise en place de « campagnes » d’envoi systématique de lettres de mise en demeure en cas d’usage litigieux ;

 

  • la mise en place annuelle de demandes d’intervention douanières qui permettent aux titulaires de droits de faire retenir par la Douane les marchandises suspectées de contrefaçon ;

 

 

  • les actions en contrefaçon devant les tribunaux compétents pour faire cesser les actes de contrefaçon litigieux, obtenir une indemnisation du préjudice subi et surtout se constituer un portefeuilles de décisions montrant au marché la mise en place d’une stratégie offensive.

 

Notre équipe est là pour vous assister dans le cadre de l’élaboration des meilleures stratégies de valorisation et de protection de vos actifs incorporels.

RENFORCEMENT DES CONTRÔLES DE LA CNIL – VIGILANCE AVEC LES COOKIES DE MESURE D’AUDIENCE

Par Mathieu GAUDEMET, Delphine GASNE FRYE & Romain SOIRON

Télécharger ici la Newsletter

 

La CNIL a récemment partagé les thématiques prioritaires de contrôle pour l’année 2021 et annonce le renforcement des contrôles concernant le respect des règles applicables aux cookies et autres traceurs. Plus précisément, à partir du mois d’avril 2021, la CNIL prévoit d’étendre ses contrôles afin de vérifier les règles relatives au recueil du consentement.

 

Pour rappel, l’article 82 de la loi Informatique et Libertés transpose en droit français l’article 5.3 de la directive ePrivacy et prévoit l’obligation, sauf exception, de recueillir le consentement des internautes avant toute opération d’écriture ou de lecture de cookies et autres traceurs. Sur ce fondement, la CNIL a adopté de nouvelles lignes directrices et recommandations portant sur l’usage des cookies.

 

Bien que certains en soient exemptés, la majorité des cookies nécessitent le recueil préalable du consentement de l’internaute.

 

Lorsque le consentement est requis, il doit être recueilli préalablement au dépôt et/ou à la lecture des cookies et être libre, spécifique, univoque, éclairé, manifesté par une déclaration ou par un acte positif clair. L’internaute doit pouvoir retirer son consentement à tout moment.

 

Parmi les cookies qui ne requièrent pas le recueil préalable du consentement, les outils destinés aux statistiques de fréquentation font l’objet d’une attention particulière. Bien que leur utilisation soit largement répandue, il est nécessaire d’en faire un usage prudent car le régime d’exemption est limité. En effet, les outils de mesure d’audience ne peuvent être exemptés que si leur usage est limité à la mesure de l’audience du site pour le compte exclusif de l’éditeur et, que les données statistiques restent anonymes. Ainsi, dès que les données sont transmises à un tiers ou lorsque les cookies permettent le suivi global de la navigation de l’utilisateur, il n’est plus possible de bénéficier de l’exemption. Il sera dès lors nécessaire de recueillir le consentement de l’internaute.

 

Notre Cabinet suit avec une attention particulière ces problématiques CNIL et accompagne l’ensemble de ses clients dans leur démarche de mise en conformité, en proposant par exemple d’établir un état des lieux et de personnaliser un document didactique destiné aux webmasters afin qu’ils procèdent aux adaptations nécessaires au respect du RGPD.

MARCHÉS PUBLICS & SPORT– PREMIÈRE APPLICATION DE LA NOTION « D’ORGANISME DE DROIT PUBLIC » AUX FÉDÉRATIONS SPORTIVES

CJUE 3 février 2021 Federazione Italiana Giuoco Calcio (FIGC), aff. C-155/19 et C-156/19

NEWSLETTER à télécharger ici – Par Mathieu GAUDEMET & Romain SOIRON

 

Dans une décision remarquée du 3 février dernier, la CJUE a pour la première fois fait application à une fédération sportive nationale de sa jurisprudence classique sur les « organismes de droit », dont les critères d’identification figurent à l’article 2 de la directive 2014/24 du 26 février sur la passation des marchés publics.

 

 

Les trois conditions cumulatives permettant de qualifier une personne morale de droit privé d’« organisme de droit public » au sens de la règlementation Marchés Publics de l’Union sont connus : avoir été créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel et commercial ; disposer de la personnalité morale ; être soumis à l’influence dominante d’un pouvoir adjudicateur (contrôle organique, financement…).

 

 

En l’espèce et aux termes d’une analyse du cas de la fédération italienne de football, qui semble toutefois largement transposable au modèle français, la Cour et son Avocat Général considèrent que :

 

  • si l’activité d’intérêt général que constitue le sport est mis en œuvre par une fédération sportive dans le cadre de missions de service public qui lui sont expressément attribuées par la règlementation nationale ;
  • alors, ladite fédération peut être considérée comme créée pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, nonobstant sa forme sociale associative et le fait qu’en parallèle, elle assure d’importantes activités commerciales.

 

Par ailleurs, la Cour considère que, si l’édiction des règles générales en matière sportive, la vérification de leur bonne application et une intervention au stade de l’organisation des compétitions et de la préparation olympique sont certes confiées au Comité national olympique italien, sans toutefois que celui-ci dispose de la faculté de règlementer l’organisation et la pratique quotidienne de la discipline, ces éléments ne sont pas de nature à déterminer un pouvoir hiérarchique du Comité sur la fédération.

 

Cette présomption n’est toutefois pas irréfragable et l’appréciation d’un tel pouvoir de contrôle implique une analyse in concreto de chaque situation d’espèce.

 

Rapporté au mode de fonctionnement français, notamment dicté par les dispositions du Code du sport, cette décision implique de considérer que les activités d’intérêt général ou de service public confiées à nos fédérations sportives nationales sont susceptibles de les qualifier elles-aussi d’organismes de droit public, dont la passation des marchés de travaux, de services et de fourniture serait alors règlementée (par application cette fois du Code de la commande publique), pourvu qu’il soit toutefois possible de démontrer que le Ministère ou une autre tutelle publique exerce sur elles une influence dominante (organique, financière ou autre).

 

Vigilance donc sur le mode de passation de ces marchés et nécessité sans doute d’une analyse casuistique de la situation de chacun.

L’EXIGIBILITE DES LOYERS PENDANT LA PERIODE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE

ARTICLE 1722 DU CODE CIVIL ET L’EXIGIBILITE DES LOYERS PENDANT LA PERIODE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE – Newsletter immo – février 2021

Tribunal judiciaire de Paris, Juge de l’exécution, 20 janvier 2021, RG n°20/80923

 

Par David TAVERNIER et Laura COHEN – Février 2021

 

Le Juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Paris a rendu un jugement remarqué en considérant, sur le fondement de l’article 1722 du Code civil, que le preneur d’un bail commercial interdit d’ouverture pendant la crise sanitaire est libéré du paiement des loyers.

 

Dans cette affaire, le preneur a saisi le juge de l’exécution afin de contester la saisie-attribution pratiquée sur ses comptes bancaires par le bailleur portant sur les loyers impayés d’avril et mai 2020.

 

Pour faire droit à la demande du preneur le Juge de l’exécution s’appuie sur l’article 1722 du Code civil relatif, initialement, à la perte matérielle de la chose louée :

 

« Si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement. »

 

Soit la perte de la chose louée est totale et le bail est résilié de plein droit, soit la perte n’est que partielle et le preneur peut « suivant les circonstances » demander ou une diminution du prix ou une résiliation du bail ; étant précisé que la perte doit être occasionnée par un « cas fortuit » qui serait, en l’espèce, la décision des pouvoirs publics de fermeture de certains établissements.

 

Aussi, parmi les abondants moyens soulevés par les preneurs durant ces douze derniers mois, seul l’article 1722 du Code civil semble avoir eu les faveurs du Juge de l’exécution pour libérer le preneur de son obligation de paiement au motif qu’il a été privé de l’usage de la chose louée en raison d’une décision des pouvoirs publics.

 

Pour ordonner la mainlevée de la saisie-attribution portant sur les loyers impayés, le Juge assimile ainsi la perte juridique et temporaire des locaux occasionnée par leur fermeture administrative à la perte partielle de la chose louée considérant que cette « impossibilité juridique survenue en cours de bail, résultant d’une décision des pouvoirs publics, d’exploiter les lieux loués est assimilable à la situation envisagée ».

 

La portée d’un tel raisonnement, jusque-là rendu de manière isolée (Chambre civile 1, du 29 novembre 1965, Publié au bulletin n°655), pourrait être considérable pour les établissements interdits d’ouverture par décision gouvernementale.

 

Néanmoins, il ne fait que peu de doute qu’un tel jugement sera frappé d’appel dans la mesure où le juge semble aller bien plus loin que les dispositions gouvernementales ; l’ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020 n’ayant que suspendu les sanctions liées aux impayés de loyers commerciaux.

DECLARATION DES DIVIDENDES ET DES INTERETS VERSES EN 2020 A FAIRE AVANT LE LUNDI 15 FEVRIER 2021 (imprimé IFU)

Lire notre Communiqué de Presse

Il conviendra de déclarer avant le 15 février prochain les revenus mobiliers versés au cours de l’année 2020.

La déclaration doit être faite sur l’imprimé n°2561 dit imprimé IFU (le millésime 2020 est disponible sur le site impôt.gouv.fr) sur lequel les sommes suivantes doivent être reportées (liste indicative) :

  • Les dividendes et distributions exceptionnelles (à l’exception des dividendes distribués entre sociétés membres d’un même groupe d’intégration fiscale) ;
  • Les intérêts de comptes courants et comptes courants bloqués (à l’exception de ceux versés à des établissements bancaires) ;
  • Les produits d’obligations ;
  • Les sommes soumises au prélèvement forfaitaire libératoire ;
  • Les jetons de présence.

Une déclaration doit être souscrite par bénéficiaire puis être déposée auprès de l’administration sur support informatique (l’envoi papier n’est pas possible).

Parallèlement, la société doit remettre à chaque bénéficiaire un feuillet 2561 ter mentionnant l’ensemble des opérations déclarées auprès de l’administration fiscale. Ce feuillet sera utilisé par le bénéficiaire pour déclarer ses revenus 2020.

La souscription de la déclaration IFU dans le délai requis est importante dans la mesure où le défaut de déclaration est en principe sanctionné par une amende fiscale égale à 50% du montant des sommes non déclarées. Certes, il existe une possibilité de régularisation mais celle-ci reste subordonnée au respect de conditions strictes.

Nous nous tenons à votre disposition pour toute question que vous pourriez avoir s’agissant de cet imprimé.

Contacts J&A : 

Virginie DAVION / Johanna MASSIAH