Newsletter Fiscal : janvier 2023

Télécharger la newsletter ici.

 

La loi de finances pour 2023 publiée au Journal officiel du 31 décembre 2022 prévoit un certain nombre de mesures fiscales tant pour les entreprises que pour les particuliers.

 

Sauf disposition contraire, ces mesures s’appliquent :

 

  • En matière d’impôt sur les sociétés : aux exercices clos à compter du 31 décembre 2022 ;
  • En matière d’impôt sur le revenu : à compter de l’impôt dû au titre de l’année 2022 ; et,
  • Pour les autres dispositions fiscales : à compter du 1er janvier 2023.

 

  1. Loi de finances : principales mesures en matière de fiscalité des entreprises :

 

  • Suppression progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur deux ans (art. 55) : Réduction de moitié du taux d’imposition (0,375% au lieu de 0,75%) en 2023 et suppression totale en 2024. En pratique, cette mesure n’impactera pas le calcul de la liquidation définitive de CVAE due au titre de 2022 qui interviendra en mai 2023, mais le calcul des acomptes de CVAE dus au titre de 2023 à acquitter en juin et septembre 2023 devra tenir compte de ce nouveau taux. Par ailleurs, le plafonnement de la cotisation économique territoriale (CET) est abaissé en deux temps (il passera de 2% à 1,625% en 2023, puis à 1,25 % en 2024).

 

  • Prorogation de 3 ans du dispositif en faveur des Jeunes Entreprises Innovantes (art. 33) : Les sociétés éligibles créées jusqu’au 31 décembre 2025 pourront bénéficier d’une exonération d’impôt sur les bénéfices, impôts locaux et cotisations sociales patronales pendant 8 ans (et non plus 11 pour l’impôt sur les bénéfices) à compter de leur création.

 

  • Augmentation de la limite des bénéfices imposables au taux réduit d’IS de 15% en faveur des PME qui est portée à 42 500€ (au lieu de 38 120€) (art. 37) ;

 

  • Extension du dispositif d’étalement des subventions d’équipement et des aides à la recherche (art. 32 et 65) respectivement aux (i) sommes versées par les organismes créés par les institutions de l’UE ainsi qu’aux sommes versées dans le cadre du dispositif des certificats d’énergie, et, aux (ii) sommes versées par l’UE et les organismes créés par ses institutions.

 

Mesures diverses :

 

  • Création d’un régime fiscal favorable aux captives de réassurance françaises (art. 6) : Afin de permettre aux entreprises de faire face aux difficultés rencontrées sur le marché de l’assurance et de lutter contre la domiciliation de captives à l’étranger, le Gouvernement a décidé de faciliter l’implantation de ces structures en France en les autorisant à constituer, en franchise d’impôt, une provision spéciale dont les modalités seront fixées dans un décret à paraître ;
  • Suppression, sous conditions, de l’obligation de conservation des titres d’une société apporteuse cotée, à laquelle est subordonné l’octroi de l’agrément pour le régime de neutralité fiscale des opérations d’apport-attribution, pour les actionnaires détenant 5% au moins des droits de vote (art. 25) ;
  • Aménagement du régime fiscal des grands évènements sportifs (art. 29) : Pérennisation et élargissement du régime fiscal dérogatoire aux sous-filiales des organismes organisateurs et élimination de la double imposition des participants aux Jeux Olympiques 2024, y compris en l’absence de convention ;
  • Création de deux contributions temporaires (i) sur les bénéfices excédentaires générés par les activités dans le secteur de l’énergie (art. 40) et (ii) à la charge des producteurs d’électricité (art. 54).
  • TVA : Mise en conformité du régime de la dispense de TVA en cas de transfert d’une universalité (art. 58), aménagement des obligations déclaratives des groupes TVA (art. 86) ;
  • Aménagement de l’obligation de facturation (art. 62) : La loi ouvre la possibilité de recourir à la procédure de cachet électronique qualifié, sous conditions (décret à paraître) et rétablit les dispenses d’amendes en cas de première infraction.

 

  1. Principales mesures en matière de fiscalité des particuliers :

 

  • Reconduction, pour un an, de l’application du taux majoré de la réduction Madelin (25% au lieu de 18%) pour souscription au capital de PME et des sociétés foncières solidaires (art. 17) : Si la loi décale l’application au 31 décembre 2023, son application reste toujours subordonnée à l’approbation de la Commission européenne et à la parution d’un décret ;

 

  • Obligation pour les contribuables de déclarer la nature des services payés pour bénéficier du crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile (art. 18) ;

 

  • Prorogation et aménagement du crédit d’impôt pour investissement en Corse (art. 43, 44 et 45) : La loi proroge ce dispositif jusqu’au 31 décembre 2027, précise la définition de « locations meublées » exclues du champ d’application et étend son bénéfice aux investissements exploités pour les besoins des transports aériens visant à assurer les évacuations sanitaires urgentes. A noter que la loi de finances rectificative pour 2022 a également précisé le critère d’investissement initial et légalisé la doctrine administrative en faveur des investissements à caractère mixte.

 

  1. Procédure fiscale

 

  • Aménagement de l’obligation de conservation des documents comptables (art. 62) : Les documents établis sur support électronique doivent être conservés sous cette forme jusqu’à l’expiration du délai de 6 ans (suppression de la faculté de les conserver en format papier après 3 ans).

 

  • Elargissement du champ des demandes de l’administration aux contrats de capitalisation étrangers (art. 70) : La loi étend les procédures de demandes d’informations ou justifications et de taxation d’office à l’ensemble des contrats de capitalisation et des placements de même nature (auparavant, seuls les contrats d’assurance-vie étaient visés).

 

Nous nous tenons à votre disposition pour toutes questions fiscales.

 


 

Equipe du département fiscal de Joffe & Associés :  Virginie DAVION, Clément PEILLET, Maëna KHALED.

ADOPTION DU REGLEMENT DIGITAL SERVICES ACT PAR LE CONSEIL DE L’UNION EUROPEENNE

Téléchargez ici la Newsletter Digital – oct 22

Article de Romain Soiron et Edouard Lucken

 

Le 4 octobre 2022, le Conseil de l’Union Européenne a formellement adopté le règlement européen relatif à un marché intérieur des services numériques et modifiant la directive 2000/31/CE, plus connu sous le nom « Digital Services Act » ou « DSA ». Celui-ci sera applicable à compter du 1er janvier 2024, sauf pour les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche qui seront concernés plus tôt par ce nouveau dispositif.

 

POURQUOI L’ADOPTION DE CE REGLEMENT ETAIT ATTENDUE ?

Depuis plus de 20 ans, l’encadrement règlementaire des acteurs de l’internet émane principalement de la directive commerce électronique 2000/31/CE datant de juin 2000. L’émergence de nouveaux services au cours de ces deux dernières décennies, comme les réseaux sociaux ou les places de marché en ligne, permettant des flux d’information et de devises de façon inédite, a rendu nécessaire une actualisation et une harmonisation de la règlementation.

Sans pour autant remplacer cette directive 2000/31/CE, le DSA a été conçu afin de :

  • combler les lacunes d’une règlementation devenue inadaptée ;
  • garantir aux internautes un environnement en ligne sûr, prévisible et de confiance ;
  • lutter efficacement contre les contenus illicites et la propagation de fausses informations en ligne ;
  • soutenir les petites entreprises de l’Union Européenne dans leur développement.

 

QUEL EST LE CHAMP D’APPLICATION DU DSA ?

Afin de garantir l’efficacité des règles du DSA et des conditions de concurrence équitables dans le marché intérieur, ce règlement a vocation à s’appliquer à (i) tous les fournisseurs de services intermédiaires, (ii) qui offrent des services dans l’Union, (iii) quel que soit leur lieu d’établissement ou leur situation géographique.

 

Sont notamment concernés :

 

  • les fournisseurs d’accès à internet (FAI) ;
  • les services d’informatique en nuage (cloud) ;
  • les réseaux sociaux et les plateformes en ligne comme les places de marché (market places) ;
  • les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche, assujettis à des obligations spécifiques.

 

De façon générale, il convient de retenir qu’afin de ne pas imposer de charges disproportionnées, les nouvelles obligations mises à la charge des fournisseurs de service seront bien souvent déterminées en considération de leur taille et de leur poids sur le marché. Plus particulièrement, les micro et petites entreprises n’atteignant pas 45 millions d’utilisateurs seront exemptées de certaines de ces obligations.

 

QUELS SONT LES GRANDS APPORTS DU DSA ?

  • Création de nouvelles autorités compétentes, les coordinateurs pour les services numériques, (sous réserve que les États membres n’assignent pas certaines missions ou certains secteurs spécifiques à d’autres autorités compétentes) ;

 

  • Obligation de proposer aux internautes un outil leur permettant de signaler facilement les contenus illicites et, une fois le signalement effectué, obligation de rapidement retirer ou bloquer l’accès au contenu illégal, sans que soit davantage précisée cette notion de « rapidité » ;

 

  • Création d’une obligation tendant à la mise en place d’un système interne de traitement des réclamations permettant aux utilisateurs dont le compte a été suspendu ou résilié (par exemple sur un réseau social) de contester cette décision ;

 

  • Création d’une obligation de transparence des systèmes de recommandations (algorithmes) ;

 

  • Renforcement des règles relatives à la publicité ciblée, dont l’interdiction des techniques de ciblage et d’amplification comprenant des données de mineurs pour l’affichage de publicités et l’interdiction du ciblage publicitaire de certains groupes de personnes en fonction de leur orientation sexuelle, un handicap, la race, etc ;

 

  • Renforcement des obligations des très grandes plateformes afin de prévenir la dissémination de fausses informations (obligation d’établissement d’un rapport annuel d’évaluation des risques, réalisation d’audits indépendants…) ;

 

  • Possibilité pour les destinataires des services numériques et les organisations représentatives de poursuivre les plateformes qui ne respectent pas les dispositions du DSA.

 

Concernant le caractère contraignant de ces obligations, il appartiendra aux États membres de déterminer le régime des sanctions applicables aux violations du règlement par les fournisseurs de services intermédiaires relevant de leur compétence.

Ils pourront notamment mettre en place des amendes, imposées par les coordinateurs pour les services numériques, pouvant aller jusqu’à 6% des revenus ou du chiffre d’affaires mondial annuel du fournisseur de services en cas de non-conformité au DSA, ou 1% des revenus ou du chiffre d’affaires mondial annuel en cas de fourniture de renseignements inexacts, incomplets ou dénaturés.

Lorsque tous les pouvoirs pour parvenir à la cessation d’une infraction au règlement auront été épuisés, que l’infraction du fournisseur de services sera persistante et entraînera un préjudice grave ne pouvant pas être évité, la Commission pourra aller jusqu’à demander au coordinateur de l’État membre concerné de limiter l’accès des bénéficiaires au service concerné par l’infraction.

NEWSLETTER IP – Septembre 2022

Téléchargez la newsletter ici.

Par Véronique Dahan et Margaux Parmentier

 

La destruction de produits contrefaisants saisis se fera désormais sans frais pour le titulaire de droits (Arrêté du 29 juillet 2022, publié au JORF du 6 août 2022)

 

Pour rappel, un titulaire d’un ou plusieurs droits de propriété intellectuelle peut déposer une demande d’intervention auprès des autorités douanières afin de renforcer leur défense.

 

En déposant une demande d’intervention douanière fondée sur le règlement (UE) n°608/2013 et/ou sur le Code de la propriété intellectuelle, le titulaire de droits sollicite la retenue de marchandises soupçonnées de contrefaire un de ses droits de propriété intellectuelle (notamment marque, brevet, dessin). Cette démarche est préventive en ce qu’elle permet au titulaire de faire contrôler des produits suspects et, ainsi, de faciliter leur interception.

 

Le dépôt d’une demande d’intervention douanière par le titulaire de droits est gratuit et est valable un an (renouvelable par écrit). Une fois accordée par la douane, celle-ci peut retenir des marchandises soupçonnées d’être contrefaisantes, et ce, même en dehors de toute infraction douanière.

 

Lors de la découverte de marchandises susceptibles d’être contrefaisantes par la douane, cette procédure permet soit de suspendre la mainlevée de la marchandise, lorsque celle-ci est en situation de dédouanement, soit de la retenir dans les autres cas, pendant une durée de dix jours maximum, afin de permettre au titulaire de droits d’expertiser les produits saisis et de faire valoir ses droits le cas échéant.

 

Pendant ce délai, le titulaire des droits peut notamment mettre en œuvre une procédure de destruction simplifiée, sous certaines conditions, ou saisir la justice.

 

Avant le 1er janvier 2019, aucuns frais n’étaient facturés par la douane au titulaire de droits. A la suite d’un arrêté du 11 décembre 2018, les frais engagés par l’administration des douanes pour le stockage, la manutention, le transport et la destruction de marchandises saisies soupçonnées d’être contrefaisantes ont donné lieu à une facturation à la charge du titulaire de droits.

 

Abrogé par un arrêté du 29 juillet 2022, le processus de facturation du titulaire de droits des frais engendrés par certaines actions douanières ne s’applique plus. Ainsi, le placement en retenue et la destruction des produits saisis sont désormais gratuits.

 

Publié au JORF du 6 août 2022, cette mesure est d’application immédiate.

Rapport « NFT » au CSPLA : jetons non-fongibles et propriété intellectuelle font-ils bon ménage ?

Article EDITIONS MULTIMEDI@ N°284  par Véronique Dahan, avocate associée, et Jérémie Leroy-Ringuet, avocat, Joffe & Associés

 

Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), instance consultative chargée de conseiller le ministère de la Culture, s’est vu remettre, le 12 juillet 2022, un rapport sur les jetons non-fongibles, ou NFT (1). L’objectif fixé à leurs auteurs – Jean Martin, président de mission, et Pauline Hot, la rapporteure – était de dresser un état des lieux et une analyse du phénomène du développement des NFT en matière littéraire et artistique.

 

 

Nature juridique : question non tranchée

 

Le rapport formule également vingt propositions destinées à informer les acteurs et à encadrer et sécuriser le marché, à un moment où les ventes de NFT connaissent un important reflux : près de 6 milliards de dollars de volume de ventes en janvier 2022 contre moins de 700 millions en juillet et même à peine 370 millions en août (2). Nous retenons de ce dense rapport de près de cent pages (3) la caractérisation d’une triple difficulté : celle de qualifier juridiquement les NFT, celle de les encadrer juridiquement, et celle de sanctionner des usages contrefaisants qu’ils occasionnent.

 

La difficile qualification juridique et l’objectif pratique des NFT en matière de propriété littéraire et artistique.

 

Le rapport part d’une constatation de la difficulté de définir les NFT, qualifiés d’« objets juridiques non identifié » (4). Il écarte toute une série de catégories juridiques : les NFT ne sont pas des œuvres d’art puisqu’ils sont le résultat de processus de codage automatisés et non le produit original de l’empreinte de la personnalité d’un auteur ; ils ne sont pas des supports d’œuvres d’art puisque, la plupart du temps, ils ne contiennent pas l’œuvre mais l’indexent ; ils ne sont ni des certificats d’authenticité ni des éléments de DRM (5) puisqu’ils peuvent porter sur des faux ou des contrefaçons ; enfin, ils ne sont pas des contrats, notamment du fait que les parties sont identifiées par des pseudonymes et que le langage de nature logicielle du NFT ne permet pas de s’assurer du consentement des parties sur le contenu du contrat. Le rapport finit par retenir plutôt la qualification, « souple », de « titre de droits sur un jeton mais aussi sur un fichier, dont l’objet, la nature, et l’étendue varie en fonction de la volonté de son émetteur exprimée par les choix techniques et éventuellement juridiques associés au smart contract ». Les NFT seraient donc assimilables à des biens meubles incorporels correspondant à des titres de propriété. Mais quand on sait que la doctrine n’est toujours pas d’accord sur la qualification d’un droit de marque (droit personnel ? droit mobilier incorporel, donc réel ? titre de propriété dont l’objet comprend les composantes traditionnelles d’usus, fructus et abusus ?), on peut imaginer que la question de la nature juridique du NFT n’est pas près d’être tranchée.
Quoi qu’il en soit, le rapport liste une série d’usages actuels ou potentiels des NFT dans le secteur littéraire et artistique, qui compose un paysage assez complet. Ce que l’on peut résumer en disant que les NFT représentent de nouvelles opportunités économiques pour les ayants droit. Il peut s’agir tout d’abord de nouveaux usages monnayés : vente d’œuvres « natives » NFT, de copies numériques d’œuvres préexistantes, de prestations associées propres à créer ou renforcer des communautés de « fans », etc.
Ces nouveaux usages monnayables pourraient particulièrement intéresser de nouveaux publics et donc de nouveaux consommateurs. Il peut ensuite s’agir de favoriser le financement de projets littéraires et artistiques : des NFT peuvent être offerts en contrepartie d’un apport à des financements participatifs de films, de publications, d’expositions, … Enfin, l’usage de NFT permet d’authentifier certains droits et de prévenir des usages contrefaisants, au moyen de smart contracts dont le rapport pointe toutefois les limites eu égard au formalisme requis, pour certains contrats, par le code de la propriété intellectuelle. Ainsi, les NFT pourraient être utilisés pour la billetterie de spectacles ou pour encadrer l’usage d’une œuvre sur laquelle des droits sont transférés.

 

 

Auteur, titulaire de droits et plateforme

 

Le rapport recommande donc d’effectuer un travail pédagogique auprès des différents acteurs pour encourager les usages vertueux des NFT, et à clarifier leur régime juridique par des voies normatives.

 

Le difficile encadrement de l’usage des NFT.

 

Créer un NFT revient soit à créer une œuvre native NFT, soit à créer la copie privée d’une œuvre acquise par le créateur du NFT. Dès lors, le rapport rappelle que ce n’est pas tant la création d’un NFT elle-même qui peut présenter un risque de non-respect des droits que l’inscription du NFT sur une plateforme spécialisée dans l’achat et la revente de NFT. En effet, le créateur du NFT ne peut l’inscrire sur cette plateforme que s’il est auteur ou titulaire des droits sur l’œuvre vers laquelle le NFT « pointe ». Or le rapport rappelle que 80 % des NFT actuellement en ligne sur la plateforme OpenSea, par exemple, sont des contrefaçons ou du spam. Ce qui représente d’ailleurs des risques pour les consommateurs potentiellement abusés.

 

 

Les ayants droit en position de force ?

 

Le rapport évoque bien sûr l’apport de la technologie blockchain sur la sécurisation de la chaîne des droits : les smart contracts liés aux NFT « pointant » vers des œuvres pourraient prévoir une « forme d’automatisation des royalties » qui, si elle ne mettra certainement pas fin aux litiges en la matière, placera les ayants droit en position de force. Le rapport analyse également en détail l’interaction potentielle du droit de suite avec les NFT. Selon le rapport, si les NFT permettent un paiement automatique des ayants droit identifiés dans le smart contract à l’occasion de chaque transfert de droits, il ne semble pas possible de tirer profit de cette technologie pour faire une application du « droit de suite » au sens de l’article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle. Et ce, en raison des critères spécifiques afférents à ce droit, notamment celui du transfert de propriété par un professionnel de la vente d’œuvres.
Enfin, le rapport s’interroge sur la qualification d’atteinte au droit moral par l’inscription d’un NFT sans l’accord de l’auteur de l’œuvre vers laquelle « pointe » le NFT : si, par exemple, une œuvre musicale est reproduite sous forme de fichier mp3, fortement compressé, ou si elle est reproduite sans mention du nom du compositeur, l’atteinte devrait pouvoir être aisément caractérisée ; mais dans le cas contraire, il restera un débat sur la question de savoir si la « transformation » d’une œuvre en NFT peut constituer une violation du droit moral.
Pour favoriser un écosystème vertueux du marché des NFT, le rapport propose l’élaboration de chartes de bonnes pratiques aux niveaux national et européen, ainsi que le développement d’outils d’observation du marché de nature à accroître la transparence sur les mouvements de fonds.

 

L’encore incertaine sanction des usages de NFT contrefaisants

 

Un des apports les plus intéressants du rapport est son analyse du statut des plateformes de NFT et des sanctions qu’elles pourraient subir, notamment en raison de la grande présence de contrefaçon parmi les NFT hébergés. Selon le rapport, il n’est pas exclu que le régime des fournisseurs de services de partage de contenu en ligne s’applique à celles qui proposent l’achat et la vente de NFT, et donc que la responsabilité des plateformes soit engagée si elles ne retirent pas promptement les contenus contrefaisants, comme l’exige la loi « Confiance dans l’économique numérique » de 2004. On regrettera, à ce sujet, qu’aucune personne de l’Arcom (ex-CSA et Hadopi) n’ait été consultée par la mission. Il est regrettable aussi de ne pas avoir consulté des magistrats spécialisés en propriété intellectuelle pour anticiper l’appréciation par les tribunaux des NFT allégués de contrefaçon et de l’application de l’arsenal procédural anti-contrefaçon. Ainsi, les praticiens pourront s’interroger sur les conditions pratiques et juridiques de la récolte de preuves de contrefaçon par des NFT : quid de la possibilité de réaliser une saisie contrefaçon descriptive, par exemple ? Il conviendrait donc que les propositions d’informations et de réflexions prônées par le rapport visent également les juges.
Nous sommes plus optimistes que le rapport sur la compétence des tribunaux français pour des atteintes à des droits d’auteur dont les titulaires sont français : les clauses attributives de juridiction des conditions générales de vente (CGV) et des conditions générales d’utilisation (CGU) des plateformes hébergeant les NFT contrefaisants ne seront pas opposables aux auteurs des œuvres contrefaites. Et la reconnaissance de plus en plus large du critère d’accessibilité en matière de contrefaçon en ligne devrait assurer la compétence des tribunaux nationaux pour des actes commis sur des sites accessibles depuis la France.
Mais le rapport soulève une question intéressante : le « caractère immuable » de la blockchain semble rendre quasiment impossible la suppression définitive de NFT contrefaisants, sinon par une procédure de « brûlage » du NFT consistant à le rendre inaccessible et par un déréférencement de la copie contrefaisante de l’œuvre, liée au NFT. La technologie évoluera peut-être encore mais, en l’état, la difficulté à faire disparaître un NFT empêche le contrefacteur de faire disparaître les preuves de la contrefaçon tout en gênant l’exécution de décisions qui ordonneraient la suppression des NFT contrefaisants.
Le « proof of stake » moins énergivore Enfin, on saluera les alertes et les propositions écologiques du rapport à propos de l’empreinte énergétique des NFT, encore mal définie mais que l’on peut comparer à celle du bitcoin, soit plusieurs dizaines de térawatts-heure (TWh) par an, c’est-à-dire la consommation électrique de pays entiers. La plupart des blockchains fonctionnent aujourd’hui sous des modèles de « preuve de travail » (proof of work) gourmandes en énergie. Or des modèles de « preuve de participation » (proof of stake) apparaissent, qui ne reposent pas sur la puissance de calcul des utilisateurs, mais sur leur participation à la crypto-monnaie. La blockchain Ethereum, très utilisée pour les NFT, est ainsi bien moins énergivore (6) depuis le 15 septembre 2022.

 

(1) – Non-Fungible Tokens (NFT).
(2) – https://lc.cx/TheBlock25-08-22
(3) – https://lc.cx/RapportCSPLA-NFT
(4) – Lire « Un NFT est un OJNI dissociant l’unicité d’un bien, lequel suppose une licence d’utilisation », EM@282, p. 8 et 9.
(5) – Digital Right Management(DRM), dispositifs techniques permettant de protéger des droits.
(6) – https://lc.cx/ETH-TheMerge

Newsletter IP – juillet 2022

Téléchargez la newsletter ici : Newsletter IP – juillet 2022

 

Deux marques « VENDÔME » viennent d’être annulées pour désigner des produits de bijouterie, joaillerie et horlogerie (INPI, 1er juillet 2022, deux décisions)

 

 

Pour rappel, le Conseil municipal de la ville de Vendôme avait approuvé la cession partielle de ses marques verbales françaises intitulées « VENDÔME » au Groupe LVMH.

 

Les deux marques avaient été enregistrées respectivement en 2012 et 2019, notamment en classe 14 qui désigne les produits de bijouterie, joaillerie et horlogerie.

 

Concrètement, l’acquisition de ces marques permettait au Groupe LVMH d’avoir un monopole sur le terme « Vendôme » pour désigner des produits de bijouterie, joaillerie et horlogerie.

 

Mais le monde de la joaillerie ne l’entendait pas ainsi. Dès juin 2021, Van Cleef & Arpels et Cartier ont initié devant l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) une double action en nullité des marques « VENDÔME » en classe 14.

 

L’INPI vient de rendre sa décision : il prononce l’annulation des deux marques « VENDÔME » en classe 14 pour défaut de caractère distinctif.

 

La marque ayant pour fonction essentielle de permettre à une entreprise de distinguer ses produits ou services de ceux de ses concurrents sur un marché donné, il est primordial qu’elle soit dotée d’un caractère distinctif ; et a contrario qu’elle ne soit pas descriptive du produit ou service qu’elle désigne. Il s’agit d’une condition essentielle de validité de la marque.

 

Dans le cas des marques « VENDÔME », l’INPI a considéré que du fait de l’association pouvant exister entre le terme « Vendôme » et la Place Vendôme, ces marques seront perçues par le public pertinent comme un « argument de vente capable d’influencer les préférences des consommateurs susceptibles d’attacher aux produits des qualités positives […] », et non comme une garantie de l’origine commerciale des produits.

 

Pour l’INPI, les marques « VENDÔME » n’apparaissent ainsi pas à même de remplir la fonction essentielle de marque pour les produits de la classe 14, si bien qu’il refuse leur appropriation par le Groupe LVMH.

 

Ces décisions sont susceptibles de faire l’objet d’un recours.

 

 

Véronique Dahan & Margaux Parmentier

Associée Propriété Intellectuelle & sa collaboratrice – cabinet d’avocats Joffe & Associés

Réindustrialisation et économie circulaire, une première en France !

Joffe & Associés (Mathieu Gaudemet et François-Xavier Fumery) est très heureux d’avoir accompagné la Métropole Rouen Normandie dans la définition de sa stratégie foncière et dans la mise en œuvre de son droit de préemption urbain, qui lui a permis de procéder à l’acquisition du site industriel de la Chapelle Darblay puis à sa revente immédiate à un opérateur majeur, garant de la continuité d’une activité papetière. Une première en France à cette échelle et un magnifique exemple de réindustrialisation au profit de l’économie circulaire !

 

Pour Nicolas Mayer-Rossignol, Maire de Rouen, Président de la Métropole Rouen Normandie :

« C’est une décision historique pour l’écologie, l’économie circulaire et la réindustrialisation en France. Et cela se passe dans l’agglomération rouennaise ! En octobre 2021 le propriétaire de Chapelle Darblay, UPM, comptait vendre l’usine à un repreneur dont le projet aurait conduit à écarter l’activité de recyclage et de traitement in situ de papiers et de cartons. Nous activions alors notre droit de préemption, comme le permet la législation française, en vue de céder le site à un repreneur à même de préserver et de développer les savoir-faire en matière d’économie circulaire. Nous signons aujourd’hui le transfert de la propriété et des actifs de l’usine Chapelle Darblay à Veolia. C’est la première fois qu’une collectivité préempte un site de cette envergure avec ses actifs de production. Le même jour nous achetons et nous revendons, en l’occurrence au groupe Véolia. Tout au long de ce combat nous nous sommes tenus debout, notamment aux côtés des représentants syndicaux, dont le combat a été exemplaire et sans qui rien n’aurait été possible. Pour la justice sociale et climatique, pour l’emploi, on se bat. »

 

Lire ici le communiqué de Presse de Métropole Rouen Normandie CP MRN Chapelle Darblay 10 mai 2022 (002)

 

Les métavers et la propriété intellectuelle : quelle protection pour les titulaires de marques ?

Article Editions Multimedia n° 276 Par Véronique DAHAN, associée du cabinet Joffe & Associés

Télécharger l’article : Newsletter IP – metavers – avril-2022

 

Le métavers – ou metaverse en anglais – est l’une des tendances les plus en vogues depuis la fin de l’année 2021. Cet intérêt soudain pour les espaces virtuels s’est fortement développé suite à l’annonce, faite par Mark Zuckerberg en octobre 2021, du changement de la déno­mination du réseau social le plus populaire du monde [2,8 mil­liards d’utilisateurs mensuels). Facebook est ainsi devenu Meta. et le géant américain a promis« de donner vie au métavers et d’aider les gens à se connecter, à trouver des communautés et à développer des entreprises».

 

Principes de spécialité et de territorialité

Il est aujourd’hui possible de rattacher un métavers à une blockchain, une chaîne de blocs {voir encadré page suivante/. Les métavers fonctionnant grâce elle permettent à leurs utilisateurs de devenir propriétaires de tous les biens virtuels qui y sont créés : parcelles de terrains, bâtiments, œuvres d’art, vêtements, etc. On peut citer comme exemple« The Sandbox Game» qui est un métavers décentralisé fonctionnant sur la blockchain Ethereum et qui offre aux utilisateurs la possibilité de créer, utiliser, acheter ou vendre toute sorte d’items numériques associés chacun à un jeton non-fongible dit NFT [Non-Fungible Token] Ces deux révolutions – métavers et blockchain – sont le signe d’une« hyperconvergence technologique» propice au métavers. Internet bascule d’un web 2.0 purement collaboratif, où les utilisateurs peuvent créer et diffuser du contenu, à un web 30 [ou Web3] immersif et appropriable. Ce basculement permet d’affirmer que le métavers n’a Jamais été aussi proche du monde réel. C’est la raison pour laquelle divers secteurs économiques – luxe, sport, mode, musique, art, … – s’intéressent aux possibilités offertes par le métavers et construisent leurs projets en conséquence. Les marques investissent d’ores et déjà dans le métavers, à l’image de Nike qui a lancé sont propres métavers sur la plateforme Roblox: Nikeland. La plateforme Decentraland a, quant à elle, organisé fin mars 2022 la toute première« Metaverse Fashion Week ». L’événement comprenait des défilés, des expositions de pièces de luxe, des concerts, des discussions et toutes sortes d’expériences virtuelles. Les marques prenant part à cet événement dans le métavers ont donc eu l’occasion de présenter leurs produits numériques sous forme de NFT, que les utilisateurs pouvaient acquérir dans le but de vêtir leur avatar de parures uniques et exclusives. Parmi ces marques, les visiteurs ont retrouvé Philipp Plein, Forever 21, Karl Lagarfeld ou encore Vogue & Hype. Beaucoup d’entreprises s’interrogent sur la stratégie à adopter pour protéger leurs marques dans le métavers. Les problématiques juridiques rencontrées dans le monde physique tendent à se transposer au métavers, que ce soit en matière de données personnelles, de droit de la consommation et évidemment de droit de la propriété intellectuelle. A ce jour, il n’existe aucune réglementation propre au métavers. A ce titre, la question de la stratégie à adopter afin d’obtenir une protection optimale de ses marques dans le métavers est cruciale.
Le droit des marques est un droit monopolistique, en ce sens que la protection découlant de la marque permet à son titulaire d’évincer tous ses concurrents de l’utilisation à des fins commerciales d’un signe distinctif identique ou similaire. Le droit des marques est régi par deux principes fondamentaux, dont l’extension au monde virtuel peut sembler épineuse: le principe de spécialité, d’une part, et le principe de territorialité, d’autre part.

 

Est-ce nécessaire de protéger sa marque pour les produits et services liés spécifiquement au métavers ?

Le code de la propriété intellectuelle [CPI] dispose que « /’en­registrement de la marque confère à son titulaire un droit de propriété sur cette marque pour les produits ou services qu’il a désignés». En vertu du principe de spécialité, une marque n’est protégée que pour les produits et services visés lors du dépôt [sauf pour les marques de renommées qui bénéficient d’une protection juridique élargie au-delà des produits et services pour lesquels elles ont été enregistrées]. Toute la question est donc de savoir si un bien ou un service du monde réel pourrait être considéré comme identique ou similaire à son équivalent virtuel et générer un risque de confusion dans l’esprit du public.

 

Réel et virtuel : risque de confusion

De prime abord, nous pourrions penser qu’un bien ou un service réel et son équivalent virtuel sont différents dans la mesure où ils ne rempliraient pas la même fonction. Si nous prenons l’exemple d’un sac: un sac virtuel n’est autre que des données informatiques représentées sur un écran. Il ne remplit pas sa fonction première qui est d’y ranger ses affaires. Toutefois, cette fonction première n’est pas la seule et unique fonction d’un sac. Comme dans le monde réel, le sac acheté dans le métavers, pour des avatars par exemple, le sera pour des considérations esthétiques et pas seulement pratiques, ainsi que pour des considérations d’image. Est-ce qu’en achetant un bien virtuel de telle ou telle marque dans le métavers, le consommateur fera-t-il le lien avec la marque/l’entreprise du monde réel? La détermination du risque de confusion est évidemment subjective et dépend de chaque cas d’espèce. la na lyse ne se fait pas uniquement au regard des produits et services.
Déposer une marque : penser au virtuel L’.examen des signes en cause et des produits/services ne se fait pas de façon hermétique : il existe une interdépendance entre ces deux éléments. Ainsi, la faible similitude entre les produits peut être compensée par là haute ressemblance entre les signes, et vice versa. De même, si le signe revêt un caractère distinctif fort ou une certaine notoriété, le risque de confusion est augmenté. Il semble donc qu’une marque pourrait a priori être suffisamment protégée contre des usages dans le méta­vers, et ce même si elle n’est enregistrée que pour désigner des produits et services« classiques » .
Pour éviter tout débat et dans la mesure où il n’y pas encore de jurisprudence en la matière, il est toutefois recommandé aux titulaires de marques de déposer leurs marques en visant également des produits et services liés au métavers : biens virtuels téléchargeables, services de divertissement, à savoir la fourniture de vêtements 1.1 virtuels en ligne et non téléchar­geables, destinés à être utilisés dans des environnements virtuels.

 

Est-il possible d’assurer la protection territoriale de la marque, produits et services, à l’ère du métavers?

La marque est un droit territorial en ce sens que le monopole que détient le titulaire sur sa marque ne peut être opposé aux tiers que sur le territoire duquel l’enregistrement a été obtenu. Il peut dès lors sembler délicat de concilier le principe de territorialité.de la marque avec le métavers. Par définition, le métavers est détaché de tout territoire puisqu’il prend la forme d’un univers à part entière.
On peut également estimer que le métavers a un caractère mondial, accessible à des utilisateurs établis aux quatre coins du globe. Se pose alors la question de savoir si une marque enregistrée uniquement en France peut bénéficier d’une protection efficace contre des actes de contrefaçon commis dans le métavers. Le simple accès au métavers par des utilisateurs français permettrait-il de considérer qu’il y a contrefaçon ?
La solution qui pourrait être adoptée serait celle communé­ment admise s’agissant des atteintes aux marques sur Internet. La jurisprudence a établi la théorie de la focalisation en matière de contrefaçon sur Internet, en vertu de laquelle l’acte de contrefaçon d’une marque française est constitué dès lors qu’un faisceau d’indices permet de démontrer que l’internaute français est la cible du site web étranger [accessibilité du site, utilisation de la langue française, livraison en France, etc. Toutefois, contrairement aux sites Internet dont il est possible de démontrer qu’ils ont un public ciblé géographiquement, le métavers est quant à lui global, ne faisant pas a priori de différences en fonction de la géolocalisation des utilisateurs.

NEWSLETTER RGPD – Sanction CNIL : Un sous-traitant condamné à une amende de 1,5 million d’euros à la suite d’une fuite massive de données.

Newsletter RGPD – avril 2022

 

Dans une décision remarquée du 15 avril 2022, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) a infligé à l’éditeur de logiciel Dedalus Biologie une amende d’1,5 million d’euros pour manquement à plusieurs dispositions du Règlement général pour la protection des données (« RGPD »). L’autorité administrative a également prononcé la publication de la sanction sur son site et sur le site de Légifrance.

 

Cette condamnation s’inscrit à la suite de la fuite massive de données personnelles, dont des données de santé, qui a concerné plusieurs laboratoires français ayant eu recours aux services du sous-traitant Dedalus. Le journal Libération, qui avait révélé l’affaire le 21 avril 2021, indiquait que les données personnelles de 500 000 patients avaient été rendues accessibles gratuitement sur le darknet.

 

Les manquements reprochés à la société Dedalus étaient les suivants :

 

  1. Manquement à l’obligation d’assurer la sécurité des données personnelles (article 32 du RGPD) ;
  2. Manquement à l’obligation de suivre les instructions de ses clients, responsables de traitement (article 28 du RGPD) ;
  3. Absence d’accords sur la protection des données (article 28 du RGPD).

 

Cette décision est inédite dans la mesure où c’est la première fois que la CNIL condamne uniquement un sous-traitant – et non le responsable de traitement – en raison d’un manquement à son obligation de sécurité. En effet, conformément à l’article 32 de RGPD, l’obligation de sécurité incombe tant au responsable de traitement qu’au sous-traitant. Dans une décision du 27 janvier 2021 , la CNIL avait condamné le responsable de traitement et son sous-traitant au paiement de sanctions administratives pour des montants différents selon leur niveau de responsabilité.

 

Que retenir de cette sanction ?

 

La sécurité des données est au cœur du RGPD et concerne tant le responsable de traitement que le sous-traitant, qui est exposé à des risques de sanctions CNIL au même titre que son donner d’ordre. La CNIL publie régulièrement les sanctions sur son site internet. Les risques en termes de e-reputation – en plus des risques juridiques et financiers – sont donc bien réels et peuvent être plus néfastes que les sanctions financières.

 

Le responsable de traitement de traitement doit :

 

  • vérifier que des accords sur la protection des données conformes aux dispositions de l’article 28 du RGPD ont été signés avec chacun de ses sous-traitants et que ces accords détaillent suffisamment les mesures de sécurité mises en place ;
  • évaluer le caractère suffisant des garanties fournies par le sous-traitant avant d’entrer en relation contractuelle avec celui-ci. A ce titre, il est recommandé d’auditer le sous-traitant et de lui demander a minima de fournir une documentation de sécurité.

 

Le sous-traitant doit quant à lui :

 

  • vérifier que des mesures de sécurité technique et organisationnelle adaptées aux risques encourus (notamment en cas de traitement de données sensibles) ont été mises en place ;
  • documenter les procédures de sécurité mises en place (création d’un plan d’assurance sécurité, politique de gestion des incidents, etc.).

 

1 Délibération de la formation restreinte n° SAN-2022-009 du 15 avril 2022 concernant la société DEDALUS BIOLOGIE

2 https://www.cnil.fr/fr/credential-stuffing-la-cnil-sanctionne-un-responsable-de-traitement-et-son-sous-traitant#:~:text=La%20formation%20restreinte%20de%20la,web%20du%20responsable%20de%20traitement

 

Le département IT/RGPD du cabinet Joffe & Associés se tient à votre disposition pour vous accompagner dans votre mise en conformité RGPD.

Contacts : Emilie de Vaucresson & Amanda Dubarry

 

 

 

 

Evolution de la dévolution automatique de certains droits de propriété intellectuelle pour les non salariés

Téléchargez ici notre Newsletter

Par Véronique DAHAN et Margaux PARMENTIER

 

Publiée au Journal Officiel du 16 décembre 2021, l’Ordonnance n°2021-1658 du 15 décembre 2021 a récemment fait évoluer le régime applicable aux auteurs de logiciels ou inventeurs non-salariés.

 

Pour rappel, il est de principe qu’une œuvre de l’esprit appartienne à son auteur et qu’une invention appartienne à son inventeur. Par exception, lorsqu’un logiciel est réalisé par un salarié (ou un agent public) dans l’exercice de ses fonctions ou d’après les instructions de  son employeur, les droits de propriété intellectuelle y afférents sont dévolus automatiquement à son employeur. Sous certaines conditions, il en est de même pour les inventions. Or, jusqu’à présent, les non-salariés, tels que les stagiaires ou les doctorants étrangers, n’étaient pas concernés par ces deux exceptions. Face à cette confusion juridique et afin de sécuriser les droits des employeurs, il leur était fortement recommandé de conclure avec leur non-salariés des contrats de cession de droits.

 

Bien qu’elle soit limitée aux logiciels (nouvel article L.113-9-1 du Code de la propriété intellectuelle) et aux inventions brevetables (nouvel article L.611-7-1 du CPI), cette Ordonnance met désormais en place un cadre légal permettant la dévolution automatique des droits de propriété intellectuelle pour les non-salariés aligné sur le régime applicable aux salariés et aux agents publics.

 

Différentes conditions sont nécessaires pour que ce nouveau régime soit applicable. S’agissant des logiciels, l’auteur, personne physique, doit être accueilli dans le cadre d’une convention et être placé sous l’autorité d’un responsable de l’entreprise. De plus, le logiciel doit être créé dans le cadre de sa mission ou d’après les instructions de l’entreprise.

 

En ce qui concerne les inventions, l’inventeur personne physique doit être accueilli dans le cadre d’une convention au sein d’une personne morale de droit privé ou de droit public réalisant de la recherche. L’invention doit avoir été réalisée dans le cadre d’une mission inventive ou d’études et de recherches explicitement confiées. Une contrepartie financière doit être versée (contrairement aux auteurs de logiciels). À cet égard, un décret en Conseil d’Etat viendra préciser prochainement les conditions d’application de ces dispositions.

 

En l’absence de dispositions transitoires, ce nouveau régime est applicable aux logiciels et inventions postérieures à l’entrée en vigueur de l’Ordonnance.

 

Notre Cabinet suit avec une attention particulière ces problématiques liées à la titularité des droits de propriété intellectuelle et accompagne l’ensemble de ses clients dans leur démarche de sécurisation et de valorisation, en proposant par exemple d’établir un audit afin qu’ils procédèrent aux régularisations nécessaires ou de rédiger des contrats de cessions de droits de propriété intellectuelle.

 

NEW WEAPONS TO FIGHT SPORTS RIGHTS PIRACY IN FRANCE

Article by, Football Legal, December 2021

 

The French National Assembly adopted the bill to regulate and protect access to cultural and artistic works in the digital age on 29 September 2021. On 21 October 2021, the Constitutional Council ruled that some provisions of this Law were contrary to the French Constitution, although none concerned anti-piracy mechanisms (Cons. const., Decision no. 2021- 826 DC, 21 October 2021). Therefore, as of 1 January 2022, organizers and broadcasters will have at their disposal very useful tools to fight against the illegal broadcasting of sports events.

 

The singularity of piracy is due to several aspects.

First, technically, piracy is not just a matter of websites that broadcast sports competitions without authorization. Many showcase sites contain many hyperlinks, which point to hosting platforms, which allow both the creation of streaming channels and the storage of pirated content on servers. These servers are rented or sublet from technical hosts or countless intermediaries, generally located in legal havens.

 

Temporally, judges cannot respond in real-time to requests from right holders who have noticed a match’s live broadcasting. The temporality of the French judicial system and the temporality of live broadcast piracy are incompatible.

 

Finally, legally, pirates are anonymous or difficult to identify and their “visible” intermediaries (technical hosts, registrars, Internet access providers, etc.) are as uncooperative as they are quick to invoke the lighter liability of the hosts to refuse to comply with the requests of rights holders. However, as far as streaming is concerned, withdrawal or blocking measures must be taken in real-time (during the broadcasting of the pirated content). Otherwise, they are of no use.

 

The adoption of this bill is a reward for the continuous efforts made for almost a decade by rights holders to protect the value of audiovisual rights, which are the main source of funding for French sports. Every consumer who turns to illegal streaming mechanically turns away from a paid legal offer to the right holders’ detriment. The music industry encountered this phenomenon at the beginning of the 2000s with the appearance of Napster and everyone is now able to measure the consequences.

 

For all these reasons, the adoption of this law and its salient measures presented below are to be welcomed.

 

L’article complet publié dans Football Legal est disponible sur demande.